Descriptif
GTao : Dr Donatini, vous êtes spécialiste de l’immunologie. Pouvez-vous nous expliquer le rôle de l’alimentation et des intestins dans la régulation de nos défenses immunitaires ?
Dr Bruno Donatini : l’intestin grêle possède des cellules M qui captent les nouveaux fragments bactériens dans la lumière intestinale. Il les présente à des lymphocytes T régulateurs chargés de réprimer toute inflammation. Si la muqueuse est perméable, les fragments ou les bactéries traversent et déclenchent une réponse inflammatoire chronique. Les défenses
immunitaires passent alors d’un mode de défense de type TH1 (anti-tumoral et antiviral) vers un mode de défense TH17 (autoimmune). L’intestin n’induit plus de tolérance. Les organes pauvres en lymphocytes régulateurs subissent alors une attaque auto-immune comme la thyroïde, les articulations ou la peau. Certaines toxines bactériennes bloquent le récepteur qui permet l’étanchéité de la barrière intestinale : la guanyl-cyclase. Surviennent alors une hyperperméabilité, puis une inflammation chronique d’où une baisse immunitaire, des infections virales, un risque accru de cancer et d’auto-immunité. Parfois, de véritables biofilms* s’organisent, résistant aux antibiotiques ou aux microbiotes bénéfiques. Ils décapent les muqueuses, dégradent les enzymes digestives et les sels biliaires, et exacerbent la malabsorption, l’inflammation et la production de produits de dégradation
délétères. L’acide acétique s’accumule sous forme de graisse dans le foie et les viscères. Les polyamines favorisent la croissance tumorale et amplifient les douleurs périphériques. Certains composés organiques volatiles induiraient
aussi des troubles du comportement ou de l’apprentissage, exacerbés par les carences dues aux défauts d’absorption.
GTao : vous insistez sur l’importance d'avoir des intestins en bonne santé. Pouvez-vous nous expliquer ce qu’est une bonne flore
intestinale et pourquoi vous déconseillez la prise de probiotiques ?
Dr B. D. : une bonne flore intestinale résulte d’une bonne absorption de nutriments dans l’intestin grêle. Elle est donc pauvre car peu
d’aliments lui parviennent. Physiologiquement, les bactéries sont détruites par l’acidité gastrique. Leur nombre croit modérément
dans l’intestin grêle (1000/ml). Ensuite, les colonies bactériennes explosent en nombre et en diversité dans le colon. Ce dernier,
pauvre en récepteurs, absorbe essentiellement l’eau. A noter que les cellules immunitaires, concentrées dans les plaques de Peyer autour de l’intestin grêle, s’intéressent à une flore pauvre. Le colon ne joue aucun rôle immunitaire alors qu’il contient 100 milliards de bactéries par gramme de selle. Plutôt que favoriser la biomasse intracolique, la capacité d’absorption de l’intestin grêle et les enzymes digestives doivent être préservées. Une fermentation ...