Descriptif
Gtao : Don Marcelino, vous préférez vous dire "homme de connaissance" plutôt que "chaman", pourquoi ?
Don Marcelino : Quand je suis arrivé en Europe(1), j’ai vu que notre tradition amérindienne était appelée "chamanisme", et que les gens qui le pratiquaient s’appelaient "chamans". J’ai commencé à voir d’où venait ce mot : d’une tribu sibérienne. Bon, qu’a à voir le Sibérie avec le Pérou ? J’ai continué mes recherches, et j’ai vu qu’un anthropologue occidental vénéré par tout le monde avait inventé ce mot pour désigner toutes les traditions de guérisseurs. Mais ça ne nous appartient pas. Alors, je dis : "Non, je ne suis pas un chaman". En plus, beaucoup de blancs, des Occidentaux, partent en Amérique pour revenir en Europe et faire leur fonds de commerce avec le chamanisme. C’est ce que j’appelle la "chama-ânerie". Alors, je dis : "Non, ça suffit !". Nous sommes des guides, des hommes de connaissance, et ce qu’on pratique, c’est la médecine amérindienne. Il y a la médecine africaine, hindoue, tibétaine, etc. Tout ça, ce sont des médecines sacrées, ce ne sont pas des choses chamaniques. Et ça, c’est le regard d’un Amérindien, de l’autre côté.
Gtao : Et un "homme de connaissance", vous le définissez comment ?
D. M. : On peut dire que c’est un guide, quelqu’un qui a vécu une initiation, une mort psychologique… Et pas pour le pouvoir. Il s’agit d’être serviteur des autres et de s’effacer devant les autres. Il faut dire qu’à partir de 1492(2), aucun Occidental n’est initié. L’initiation se fait dans la clandestinité et entre amérindiens.Il existe d’autres initiations, et pas seulement amérindiennes. Bien sûr. Il y a l’initiation tibétaine, ou africaine. C’est différent, mais toujours, c’est une mort psychologique.Je suis étonnée que vous parliez de psychologie. J’utilise le terme qu’un Occidental comprend. Par exemple, au Pérou, dans les campagnes, on voyage pour ramener une âme perdue. En langage occidental, on travaille pour que la personne récupère son énergie.
Gtao : Et le terme d’"inconscient" qu’utilisent les Occidentaux, est-ce qu’il vous parle ?
D. M. : Oui. Mais pour nous, ce n’est pas nouveau. Freud est l’inventeur de l’inconscient qu’il définit comme la partie où se cachent les choses qu’on a réprimées, mais je ne suis pas d’accord avec lui quand il dit que dans l’inconscient se trouve le pire que l’on peut trouver, et qu’il faut sortir tout ça. Pour nous, ...