Descriptif
Les attributs caractéristiques de Yin et Yang sont généralement présentés dans les ouvrages occidentaux chacun à l’intérieur de petites cases fermées et disposées en deux colonnes. Cet aspect bien ordonné est très insidieux car il contribue à assurer, inconsciemment, l’idée d’une nature Yin et d’une nature Yang qui seraient distinctes et séparées. Comment se figurer les deux versants de la même montagne, en regardant un empilement d’enclos ? Mais l’effet le plus négatif de ces tableaux réside à la fois dans le choix des mots qu’on y fait figurer, et aussi dans leur disposition même. Comme le fait remarquer le professeur Kaménarovic, dans les couples de mots français qui sont associés à Yin/Yang, est toujours placé en tête celui des deux qui, à nos yeux, est le plus valorisé. Or, cette disposition occidentale est à rebours de l’énonciation chinoise qui commence toujours par Yin. Ce que ce détail souligne, c’est cette tendance occidentale à valoriser le Yang. On s’en apercevra dans les quelques exemples donnés ci-dessous où les couplages présentés ont justement été énoncés à rebours de l’ordre usuel, en fait, dans l’ordre chinois. Tout aussi productif d’une compréhension biaisée est le fait que les couples de mots choisis pour évoquer Yin/Yang sont des noms ou des adjectifs, une catégorisation très inappropriée car elle transforme les emblèmes chinois de la fluidité en marques fixes et rigides.
Femme-homme = féminin-masculin
Certainement les pires des binômes mis en relation avec Yin/Yang et malheureusement les plus répandus, et sur ce point, les Chinois sont très responsables. En effet, dès l’époque des Han, ils ont utilisé la dialectique Yin/Yang pour argumenter l’attitude injuste qu’ils imposaient aux femmes. Partant du Yang comme mouvement centrifuge et du Yin comme mouvement centripète, identifiant ensuite de manière douteuse vectorisation et localisation, ils en ont tiré la conclusion que l’extérieur était le lieu dévolu aux hommes et l’intérieur la place où les femmes devaient être confinées. Double dévoiement associant d’abord un lieu et un genre, et ensuite un genre et une assignation pour en conclure la justesse « naturelle » de l’enfermement des femmes dans la maison.
Ce genre de perversion, mélangeant les caractéristiques spécifiques de Yin et de Yang avec les rôles masculins et féminins, est resté très profondément ancré dans l’inconscient collectif chinois. En voilà un exemple illustrant la perversion d’un couplage classique de Yin/Yang, le fait que du côté du Yin se situe le multiple et ...